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Depuis son indépendance en 1962, l’Algérie est gouvernée par un régime militaire qui a confisqué les aspirations démocratiques du peuple. Ce système oligarchique, dominé par une élite militaire et politique, s’est maintenu au pouvoir en concentrant les richesses nationales entre les mains de quelques-uns, tout en réprimant violemment toute opposition.
Récemment, l’arrestation de l’écrivain franco-algérien Boualem Sansal a mis en lumière la répression exercée par ce régime. Critique du pouvoir et de certains épisodes du récit national officiel, Sansal est poursuivi pour « crimes qualifiés d’actes terroristes ou subversifs », risquant la prison à perpétuité. Cet événement illustre une volonté constante de réduire au silence les voix dissidentes et de contrôler le discours public, en particulier autour des questions historiques et politiques.
Le régime algérien puise ses origines dans les bouleversements qui ont suivi les accords d’Évian, signés le 18 mars 1962. Alors que le pays célébrait son indépendance, le FLN, principal mouvement de libération, s’est rapidement transformé en un parti unique dominant. Les luttes internes pour le pouvoir, marquées par le renversement d’Ahmed Ben Bella par Houari Boumédiène en 1965, ont instauré un modèle autoritaire où l’armée occupe une place centrale dans la gouvernance.
Au fil des décennies, cette élite dirigeante a su tirer parti des ressources naturelles du pays, en particulier des hydrocarbures, pour asseoir son pouvoir. Les revenus pétroliers, qui représentent plus de 95 % des exportations de l’Algérie, ont été massivement détournés au profit de la classe dirigeante, laissant la majorité de la population dans une précarité alarmante. Les infrastructures, l’éducation et le système de santé se sont dégradés, tandis que les jeunes Algériens, confrontés au chômage et à l’absence de perspectives, expriment de plus en plus leur frustration.
Pour légitimer son pouvoir, le régime a également pris le contrôle du récit national. L’histoire officielle glorifie le rôle du FLN et occulte les divisions, les violences internes et les zones d’ombre de la lutte pour l’indépendance. Ceux qui remettent en question cette version, comme Boualem Sansal, sont qualifiés de traîtres ou d’ennemis de l’État. Cette manipulation historique permet au pouvoir de se présenter comme le garant de l’héritage révolutionnaire, tout en muselant les voix critiques.
Sur le plan international, le régime algérien utilise une rhétorique nationaliste pour détourner l’attention de ses échecs internes. Les tensions récurrentes avec la France, notamment sur les questions mémorielles, et l’escalade des hostilités avec le Maroc autour du conflit du Sahara , témoignent d’une stratégie visant à consolider une base nationaliste au détriment des réformes nécessaires.
Malgré la répression, le mouvement Hirak, né en 2019, a montré que la société algérienne aspire à un changement profond. Les manifestations massives ont exprimé un rejet du système en place, même si ce dernier a réussi, pour l’instant, à étouffer la contestation par des arrestations et des restrictions. Cependant, les frustrations sociales et économiques, combinées au vieillissement de la classe dirigeante, posent la question de la durabilité de ce régime.
Après six décennies de dictature militaire, l’Algérie se trouve à un tournant décisif. La lutte entre un régime s’accrochant à ses privilèges et une population en quête de liberté et de justice sociale pourrait bien définir l’avenir du pays.