Lors d’un discours prononcé ce dimanche à Fès, Abdelilah Benkirane, secrétaire général du Parti de la Justice et du Développement (PJD), a tenté de clarifier sa position controversée vis-à-vis de l’Iran, tout en réaffirmant son attachement au Maroc. Une intervention marquée par un équilibre fragile entre patriotisme national et solidarité religieuse avec un pays considéré comme hostile par le Royaume.
Un soutien conditionnel au Maroc face à l’Iran
Benkirane a tenu à souligner que, dans le cas d’un conflit bilatéral, il se rangerait résolument du côté du Maroc, même contre l’Iran. « Si le différend est entre le Maroc et l’Iran, je soutiendrai mon pays sans hésitation », a-t-il affirmé, tout en précisant que l’opposition actuelle entre Téhéran et Tel-Aviv relevait d’un affrontement géopolitique global, dans lequel Rabat n’est pas directement engagé.
Des contradictions persistantes
Le leader islamiste a toutefois admis les désaccords profonds avec le régime iranien, notamment sur le plan doctrinal, soulignant que « les innovations religieuses de l’Iran ne sont pas les nôtres ». Il a cependant justifié sa posture en expliquant que son soutien à l’Iran s’inscrivait dans un cadre de solidarité islamique, en raison de son engagement aux côtés de la cause palestinienne et de son opposition farouche à Israël.
Cette position ambivalente n’a pas manqué d’interpeller, d’autant plus que Téhéran est accusé par Rabat de soutenir le Polisario et d’entretenir des relations stratégiques avec l’Algérie, rivale régionale du Royaume.
Un discours teinté de messianisme
Adoptant un ton fortement religieux et mobilisateur, Benkirane a livré un discours où se mêlaient ferveur islamique, dénonciation virulente d’Israël et références historiques à l’expulsion de puissances étrangères. Qualifiant l’État hébreu de « régime criminel » fondé sur « le meurtre, le siège et la faim », il a prophétisé sa disparition, comparant son sort futur à celui des Croisés ou des colonisateurs expulsés par le passé.
Hommage aux icônes palestiniennes et rejet de la normalisation
Dans un vibrant hommage aux figures de la résistance palestinienne comme Yasser Arafat, Ahmed Yassine ou encore Abdel Aziz Rantissi, Benkirane a insisté sur la capacité de l’Oumma à régénérer une élite de leaders combatifs, malgré les tentatives d’anéantissement.
Fidèle à sa ligne anti-normalisation, il a mis en garde contre les illusions stratégiques : « Si vous pensez qu’en détruisant l’Iran ou le Hamas vous allez régler le problème, vous vous trompez. L’Oumma compte plus de deux milliards d’individus. »
Une stratégie de reconquête ?
Ce discours intervient dans un contexte difficile pour le PJD, encore marqué par la lourde défaite électorale de 2021. En ressuscitant les grandes causes identitaires et en mobilisant autour de la cause palestinienne, Benkirane semble chercher à rassembler sa base militante en vue des échéances de 2026.