Le Maroc ouvre son marché à l’huile d’olive brésilienne : un pari diplomatique aux enjeux économiques
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Le ministère brésilien de l'Agriculture et de l'Élevage a annoncé que le Maroc a donné son aval pour l'importation d'huile d'olive brésilienne, exprimant son « enthousiasme » face à cette décision. Ce nouveau permis vient s'ajouter à une autorisation accordée en septembre dernier pour l'exportation de drêches séchées destinées au marché marocain.
Dans son communiqué, le ministère brésilien a rappelé que le Maroc s'était imposé, l'an dernier, comme la troisième destination en Afrique pour les exportations agricoles brésiliennes, avec un volume total de 1,23 milliard de dollars. Entre janvier et septembre de cette année, les exportations vers le Maroc ont déjà dépassé les 903 millions de dollars.
Commentant cette nouvelle ouverture, l'expert agricole, Riadh Ouhteyta, a souligné que cette orientation vers le marché européen s’inscrit davantage dans une stratégie diplomatique que purement économique. Bien que le Brésil propose des variétés similaires à celles de l’Espagne, mais à un coût plus élevé, l’objectif est d’intensifier la compétitivité et de limiter l’influence des intermédiaires étrangers sur les prix.
L’expert a également rappelé que cette politique vise à éviter la répétition de scénarios tels que l’importation de moutons pour l’Aïd al-Adha, où l'intervention des intermédiaires étrangers avait contribué à la hausse des prix. En autorisant l'importation d'huile d'olive, le risque est de voir les prix de cette dernière impactés de manière similaire par les spéculations des intermédiaires.
En ce qui concerne l'attrait du Brésil, Ouhteyta a précisé que l'huile d'olive fait partie intégrante de la « culture » brésilienne, où elle est consommée quotidiennement. Le Brésil s'est aussi illustré comme un partenaire stratégique durant les six années de sécheresse, notamment par des exportations de bovins vers le Maroc.
Quant aux prix sur le marché extérieur, Ouhteyta a noté que la marge bénéficiaire par litre d’huile d’olive s’élève à 30 dirhams, alors que le coût de production moyen d'un litre ne dépasse pas 65 dirhams, un écart injustifié par rapport au prix de vente atteignant parfois 100 dirhams.
Ouhteyta a ainsi mis en lumière le rôle des intermédiaires dans la chaîne de production de l'huile d'olive : les agriculteurs, ne disposant pas des moyens nécessaires pour presser directement leurs olives, vendent leur récolte à des courtiers qui contrôlent ensuite le processus et imposent leurs marges élevées.
Face à cette inflation des prix, Ouhteyta a mis en garde contre la prolifération de pratiques frauduleuses, avec la vente d'huiles falsifiées sans agrément de l'Office National de Sécurité Sanitaire des Produits Alimentaires (ONSSA). Il a plaidé pour une meilleure régulation en intégrant l'huile d'olive dans les grandes surfaces soumises aux contrôles de l'ONSSA, afin de protéger les consommateurs et d’éviter que des quantités d’huile non certifiées circulent en dehors des circuits officiels, exposant ainsi le public à des risques sanitaires.