La controverse refait surface au Maroc concernant la limite d’âge de 30 ans imposée par le ministère de l’Éducation nationale, du Préscolaire et des Sports pour se présenter aux concours de recrutement des enseignants. À l’approche de ces examens, syndicats, diplômés et jeunes chômeurs multiplient les appels à l’annulation de cette restriction, qu’ils jugent “injuste et discriminatoire” envers des milliers de diplômés.
Le ministre de l’Éducation nationale, Mohamed Saad Barada, a annoncé lundi 13 octobre 2025 devant le Parlement que son département réexaminera la décision, en réponse aux demandes des syndicats et des parlementaires. Il a précisé que les académies régionales ont besoin de 20 000 nouveaux postes cette année, et que la limite d’âge avait pour objectif de “renforcer l’attractivité du métier, assurer une carrière stable et valoriser l’investissement en formation”.
Mais les syndicats du secteur jugent la mesure antidémocratique et contraire à la loi sur la fonction publique, qui fixe l’âge maximum de recrutement à 45 ans. Selon Abdellah Ghmimat, secrétaire général de la Fédération marocaine de l’enseignement (tendance démocratique), cette politique “élimine le droit à l’emploi de milliers de jeunes diplômés” et “accentue la crise du chômage”. Il plaide pour un retour à la limite de 45 ans afin de garantir “l’égalité d’accès aux carrières publiques”.
De son côté, Mostafa Asrouti, membre du bureau national de l’Union nationale des fonctionnaires de l’éducation, estime que le ministère a agi de manière “précipitée et non concertée”, provoquant “une pénurie de candidats dans plusieurs matières essentielles comme les mathématiques et le français”. Il dénonce une mesure “illégale et purement administrative” en contradiction avec le cadre constitutionnel.
Pour les syndicats, la décision relève davantage de considérations financières que pédagogiques, et serait liée aux recommandations de la Banque mondiale sur la réduction des années de service afin de préserver les équilibres des régimes de retraite.
L’ancien ministre Chakib Benmoussa, à l’origine de cette mesure en 2021, avait défendu la limite d’âge en arguant qu’“un recrutement plus jeune favorise une meilleure formation et une carrière plus longue”. Le gouvernement actuel, par la voix de Mustapha Baitas, porte-parole, a maintenu la même ligne, estimant que “chaque secteur est libre de fixer ses critères”.
Cependant, le débat prend une tournure sociale plus large : selon le Conseil économique, social et environnemental, le Maroc compte plus de 1,5 million de jeunes sans emploi, et l’exclusion des plus de 30 ans des concours de l’enseignement ne fait qu’aggraver la frustration d’une génération déjà marginalisée.