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Crise de l’eau au Maroc : les barrages peinent à se remplir, les grandes villes sous tension

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Malgré les précipitations enregistrées en mars et avril, le Maroc reste confronté à une situation hydrique critique. Les besoins en eau potable dépassent les 1,7 milliard de mètres cubes par an, et les grandes villes comme Casablanca, Tanger et Marrakech se retrouvent en première ligne face aux effets persistants de la sécheresse.

Au 30 juin 2025, le taux national de remplissage des barrages n’atteint que 37,9 %, selon les données publiées par la plateforme du ministère de l’Équipement et de l’Eau, « الما ديالنا ». Une situation qui inquiète les experts, d’autant que les métropoles consomment des volumes considérables : plus de 207 millions de m³ pour Casablanca, 71,3 millions pour Tanger et plus de 70 millions pour Marrakech.

Des solutions en cours, mais un rythme d’exécution jugé trop lent
Pour faire face à cette pression, les autorités ont lancé plusieurs projets structurants : usines de dessalement, interconnexion des bassins, forages d’urgence et modernisation des réseaux. Mais pour Omayma Khalil El Fenn, experte en ingénierie hydrique, cela reste insuffisant si les délais de mise en œuvre ne sont pas raccourcis.

« Le droit à l’eau est un pilier fondamental de la dignité humaine. Il faut que les stratégies deviennent réalité, sinon c’est le citoyen ordinaire qui en paiera le prix », alerte-t-elle.
Elle appelle à une gouvernance de l’eau plus inclusive, intégrant les collectivités territoriales, et à un changement profond des comportements, avec la généralisation de la réutilisation des eaux usées et l’adoption de pratiques de consommation sobres.

Des bassins stratégiques, mais sous pression
Les niveaux de remplissage varient fortement selon les bassins, mais la tendance générale reste préoccupante :

Sebou : 50,5 %, soit 2.808 millions de m³ – principal bassin qui alimente Rabat et Casablanca via le mégaprojet Sebou-Bouregreg.
Bouregreg : 64 %, avec un stock de 693,4 millions de m³.
Oum Errabia : seulement 11,5 %, avec un effondrement critique du barrage Massira (121,4 millions de m³).
Tensift (Marrakech) : 48,4 %, soit 110 millions de m³, un niveau insuffisant face à la demande estivale.
Souss-Massa (Agadir) : 20 %, malgré l’entrée en service de la station de dessalement.
Draa-Oued Noun : 33,8 %, soit 354,6 millions de m³.
Moulouya : 35,6 %, avec une pression accrue due aux activités agricoles.
Loukkos (Tanger) et Guir-Ziz-Rhéris présentent les taux les plus élevés, autour de 57 %, grâce à des précipitations plus stables et une pression démographique moindre.
Une crise silencieuse mais bien réelle
Les projets en cours, comme le dessalement à Agadir, les forages dans les barrages Idriss Ier et Al Wahda pour sécuriser Fès et Meknès, ou encore la modernisation des réseaux, sont essentiels. Mais selon les spécialistes, ils ne suffiront pas à eux seuls.

Le Maroc est désormais face à une urgence hydrique qui ne peut plus être ignorée. Dans un pays exposé à une variabilité climatique extrême, le stress hydrique est devenu une réalité quotidienne.
La bataille pour l’eau ne se gagne pas uniquement sur le terrain technique, mais surtout dans la volonté politique, l’anticipation et l’implication citoyenne. L’avenir hydrique du Royaume dépendra de la capacité de tous les acteurs à passer du constat à l’action.

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