Réforme de la santé au Maroc – La gouvernance, entre ambitions et attentes citoyennes

Le Maroc s’est résolument engagé dans une refonte profonde de son système de santé. Avec ses nouvelles agences, ses groupes territoriaux et sa Haute Autorité de Santé, l’architecture de gouvernance proposée semble robuste sur le papier. Mais au-delà des structures, quels résultats concrets peuvent en attendre les citoyens ? La réforme sera-t-elle capable d’améliorer tangiblement l’accès aux soins et la qualité des services de proximité ?

Certes, la création des Groupes sanitaires territoriaux est une avancée. Mais comment garantir que ces instances ne reproduiront pas, à l’échelle locale, les lourdeurs de l’administration centrale ? Pour éviter cet écueil, il est impératif de mettre en place des mécanismes de redevabilité publique : rapports d’activité trimestriels accessibles à tous, instances de dialogue avec les associations de patients, et indicateurs de performance clairs – comme les délais d’attente ou la satisfaction des usagers – affichés dans chaque établissement.

De même, la digitalisation est présentée comme un levier de transparence. Pourquoi ne pas généraliser des tableaux de bord ouverts permettant à chacun de suivre en temps réel les stocks de médicaments, les taux d’occupation des lits, ou encore le nombre de professionnels par territoire ? La transparence des données n’est pas qu’un outil de contrôle ; c’est un instrument de confiance.

La nouvelle Agence du médicament et la plateforme logistique nationale doivent résorber les pénuries. Mais comment s’assurer que les médicaments essentiels seront disponibles dans le dispensaire le plus reculé ? Un système d’alerte précoce, associé à une logistique adaptée aux zones enclavées, pourrait faire la différence. Et si chaque rupture de stock déclenchait une enquête et une réponse sous 72 heures ?

Enfin, la Haute Autorité de Santé aura un rôle clé pour évaluer la qualité des soins. Pourquoi ne pas lui confier également la mission de publier chaque année un « état des lieux de l’accès aux soins » par région, avec des préconisations ciblées ? Et si les financements futurs étaient conditionnés à l’amélioration des résultats sur le terrain ?

La réforme de la gouvernance sanitaire marocaine est une chance historique. Mais sa crédibilité dépendra de sa capacité à passer des structures aux services, et des textes aux résultats. Il ne s’agit pas seulement de mieux gérer le système, mais de le rendre plus juste, plus lisible et plus proche de ceux qui en ont le plus besoin. Le citoyen doit en voir les effets dans son centre de santé, dans son hôpital, dans son quotidien. C’est à cette aune que la réforme sera jugée.

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