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Jeune Afrique alerte sur une dérive sécuritaire en Algérie derrière la relance du projet de mobilisation

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Dans une démarche lourde de symboles et de non-dits, le régime algérien a décidé de remettre sur la table le projet de loi relatif à la « mobilisation générale ». Ce retour inattendu intervient dans un climat régional particulièrement tendu — marqué par des relations crispées avec le Maroc, une instabilité chronique en Libye et des insécurités persistantes au Sahel. Officiellement présenté comme une mesure de mise en œuvre de l’article 99 de la Constitution amendée en 2020, ce texte soulève pourtant de vives interrogations sur ses véritables objectifs. C’est ce que révèle une analyse publiée par l’hebdomadaire panafricain Jeune Afrique.

Adopté en Conseil des ministres le 20 avril, le projet de loi accorde au chef de l’État — étroitement lié à la hiérarchie militaire — la prérogative de décréter la mobilisation générale en cas d’« agression extérieure » ou de « menace à la souveraineté nationale ». Des termes volontairement ambigus, ouvrant la voie à des interprétations extensives et potentiellement liberticides, notamment à l’encontre des mouvements de contestation internes ou pour justifier une escalade diplomatique avec les voisins, en particulier le Maroc.

Le texte n’est pas une nouveauté. Il figurait à l’ordre du jour du Parlement depuis octobre 2024, avant d’être brusquement relancé. Ce timing, souligne Jeune Afrique, ne doit rien au hasard : il répond à une stratégie claire du régime, qui, confronté à une crise socioéconomique aiguë, cherche à détourner l’attention populaire en ressuscitant la figure d’un ennemi extérieur. Une manœuvre classique dans l’arsenal des régimes autoritaires en quête de légitimité.

La teneur même du projet traduit une vision militariste de l’organisation de la société. Il prévoit la mobilisation des réservistes selon des critères d’ancienneté, assortie de lourdes sanctions pour ceux qui manqueraient à leur « devoir national », avec la menace de tribunaux militaires. En contrepartie, des garanties sont avancées — telles que le maintien des postes civils et des salaires — mais leur faisabilité reste sujette à caution dans un contexte de gouvernance déficiente et de défiance généralisée.

Plus préoccupant encore, la loi confère au président des pouvoirs exceptionnels, sans véritable contrôle parlementaire ni mécanismes de limitation. Une dérive autoritaire qui rappelle les lois d’exception utilisées par d’anciens régimes pour museler toute forme d’opposition. L’absence totale de garde-fous institutionnels laisse craindre une instrumentalisation de la loi à des fins de répression intérieure ou d’aventure extérieure.

En somme, comme le souligne Jeune Afrique, cette loi sur la mobilisation générale semble moins répondre à une nécessité sécuritaire qu’à une volonté politique de renforcer l’étau du pouvoir sur une population désabusée. Plutôt que d’affronter les véritables urgences du pays — crise économique, chômage endémique, désespoir des jeunes — le régime préfère raviver l’illusion d’une menace venue d’ailleurs. Mais le véritable danger, conclut l’analyse, se trouve moins aux frontières de l’Algérie que dans les échecs répétés de ceux qui la dirigent.

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