Algérie : La solidarité sous surveillance, le régime verrouille les rues
Dans une décision pour le moins déroutante, le ministère algérien de l’Intérieur a ordonné que toute manifestation de soutien à la Palestine se tienne exclusivement dans des lieux fermés. Une injonction révélatrice d’un pouvoir plus préoccupé par le contrôle de sa propre population que par la défense d’une cause pourtant brandie avec ferveur dans ses discours officiels.
Alors que la bande de Gaza vit l’une de ses pires tragédies humanitaires et que, partout dans le monde, des milliers de citoyens descendent dans la rue pour exprimer leur solidarité avec le peuple palestinien, Alger choisit de faire taire sa rue. Douze partis politiques avaient sollicité l’autorisation d’organiser une marche pacifique dans la capitale, sous le slogan : « L’Algérie avec la Palestine… contre le blocus et les déplacements forcés ». La réponse est tombée : refus catégorique. À la place, les autorités proposent des rassemblements confinés dans des salles de réunion officiellement agréées.
Une décision qui illustre cruellement le décalage entre le discours officiel et la réalité du terrain. Alors que les autorités ne cessent de revendiquer leur attachement à la cause palestinienne, elles interdisent à leurs citoyens d’exprimer librement leur solidarité. Comme si le soutien au peuple de Gaza devenait subitement subversif dès lors qu’il s’exprime dans l’espace public.
Au cœur de cette posture autoritaire se cache une obsession persistante : celle de la rue algérienne. Depuis le soulèvement populaire du Hirak, le régime n’a eu de cesse de restreindre les libertés d’expression et de manifestation. Même lorsqu’il s’agit d’une cause universellement soutenue comme celle de la Palestine, toute mobilisation non encadrée est perçue comme un risque. Le pouvoir redoute que la foule, une fois rassemblée, dépasse le cadre fixé et ravive les revendications politiques étouffées.
L’absurde atteint son paroxysme lorsque l’on apprend que plusieurs jeunes ont été arrêtés à Alger pour avoir tenté d’exprimer pacifiquement leur soutien à Gaza. Parmi eux, figure le fils d’Abderrazak Makri, ancien président du Mouvement de la société pour la paix (MSP). Un symbole fort, et un message limpide : en Algérie, même la solidarité peut conduire à l’arrestation.
Dans les arènes internationales, le régime algérien continue pourtant de multiplier les déclarations enflammées, se posant en fervent défenseur de la cause palestinienne. À l’intérieur, c’est une tout autre réalité : les slogans remplacent l’action, et la compassion se pratique à huis clos, sous contrôle strict.
Cette duplicité est de plus en plus visible. Derrière la façade de solidarité, c’est la peur d’un peuple en quête de liberté qui dicte la conduite du pouvoir. Mais malgré les interdits, la société algérienne continue de faire entendre sa voix, refusant de laisser sa solidarité, son humanité, et sa dignité, enfermées entre quatre murs.