L’Assemblée nationale a connu une séance houleuse, jeudi 6 février, lors de l’adoption de mesures restreignant le droit du sol à Mayotte. Portée par la droite et soutenue par le gouvernement ainsi que le Rassemblement national, cette réforme prévoit que, désormais, un enfant né dans l’archipel ne pourra obtenir la nationalité française que si ses deux parents, et non plus un seul, résident en situation régulière en France depuis au moins trois ans, contre trois mois auparavant.
Malgré l’opposition de la gauche, qui a tenté de bloquer le texte, la proposition de loi des Républicains a été adoptée par 162 voix contre 93. Ce texte doit désormais être examiné au Sénat.
Une adoption sous tension
La séance a été marquée par des interruptions à répétition, des rappels au règlement et de vifs échanges. Dans la confusion, plusieurs députés de gauche ont accidentellement soutenu un amendement de l’Union de la droite républicaine (UDR), portant à trois ans le délai de résidence nécessaire pour les parents. De même, cinq députés du RN ont voté contre le texte par erreur.
Si le groupe Les Républicains célèbre cette adoption comme une « victoire », le ministre de la Justice, Gérald Darmanin, a d’ores et déjà annoncé que le Sénat devrait rectifier certaines dispositions. Il a averti qu’aller au-delà d’un an de résidence pourrait rendre la loi inconstitutionnelle.
Une fracture politique sur le droit du sol
Gérald Darmanin ne cache pas son souhait d’élargir cette réforme au-delà de Mayotte, incluant la Guyane, et d’ouvrir un débat national sur le droit du sol en France. Une position contestée par la ministre de l’Éducation nationale, Élisabeth Borne, qui s’est déclarée opposée à une telle évolution.
Les Républicains et le Rassemblement national, de leur côté, réclament une suppression totale du droit du sol en France. François-Xavier Bellamy, eurodéputé LR, estime qu’il s’agit d’une « urgence vitale pour les Mahorais », accusant la gauche d’ignorer « la souffrance des gens ».
À l’inverse, la socialiste Colette Capdevielle dénonce un « très mauvais signal », rappelant que le droit du sol n’avait été supprimé en France que sous le régime de Vichy, entre 1940 et 1944.
Un débat plus large sur l’identité nationale ?
Invité sur RMC, François Bayrou a critiqué un débat « trop étroit », appelant à une réflexion plus large sur l’identité française et l’appartenance nationale. « Qu’est-ce que signifie être Français ? Quels droits et devoirs cela implique-t-il ? », s’est interrogé le Premier ministre, faisant écho à sa récente déclaration sur un « sentiment de submersion » migratoire.
Dans l’hémicycle, les députés du camp présidentiel étaient peu nombreux lors du vote, un fait que la gauche n’a pas manqué de souligner, accusant la majorité d’avoir ouvert une « boîte de Pandore » avec cette réforme.