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Université Ibn Tofaïl sous tension : qui mettra fin à l’hémorragie dans le cursus de journalisme ?

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À Kénitra, l’Université Ibn Tofaïl – et plus précisément sa Faculté des Langues, des Lettres et des Arts – est aujourd’hui le théâtre d’une crise silencieuse mais profonde, qui menace l’un des projets pédagogiques les plus structurants en matière de formation au journalisme et à la communication au Maroc. Derrière une façade académique apparemment calme se dissimule un malaise grandissant : le non-versement prolongé des indemnités dues aux enseignants-chercheurs encadrants, et ce, en dépit du règlement intégral des frais par les étudiants et de l’achèvement complet de leur cursus.

Le paradoxe frôle l’absurde. Les comptes de l’université affichent un solde alloué à la formation dépassant les 12 millions de dirhams, pourtant bloqué par une inertie administrative entêtée et une bureaucratie pesante. Ce dysfonctionnement a eu pour conséquence directe la suspension des enseignements, aggravant la fracture entre le corps professoral et l’administration, et compromettant gravement la continuité du programme.

Face à cette impasse, le Dr. Mhammed Hammouch, coordinateur des filières de licence et master en journalisme, a décidé de recourir aux voies légales. Son avocat, Hicham Baba (barreau de Rabat), a adressé une mise en demeure formelle au doyen de la faculté, exigeant le paiement de 772 027,10 dirhams pour des prestations d’enseignement, d’encadrement et de déplacement effectuées durant les années universitaires 2021-2022 et 2022-2023, couvrant deux promotions de licence et la première promotion de master.

Dans sa correspondance, l’avocat rappelle que l’ensemble des prestations a été dûment validé par la présidence de l’université et le ministère de tutelle. Pourtant, la faculté persiste à bloquer les paiements sans justification valable, violant ainsi les obligations juridiques et les principes déontologiques auxquels elle est censée se conformer.

La situation a également mobilisé la Ligue Marocaine de la Citoyenneté et des Droits de l’Hommes, qui, dans un communiqué virulent, dénonce une atteinte grave à une initiative académique ayant permis à de nombreux jeunes d’intégrer le monde des médias dans un cadre rigoureux, éthique et novateur. La Ligue en appelle à une intervention urgente des plus hautes instances universitaires pour débloquer la situation, réaffirme son soutien aux enseignants lésés, et salue la détermination du coordinateur pédagogique à préserver cette filière d’excellence.

En outre, la Ligue agite la menace d’un sit-in coordonné par d’anciens étudiants et sympathisants, dans une tentative de sauver ce qui reste d’un projet académique aujourd’hui en péril. Un enseignant concerné par le blocage témoigne avec amertume : « Cela fait plus de quatre ans que certains d’entre nous attendent leurs indemnités. Ce silence des autorités est aussi révoltant qu’injustifiable. »

Il appelle à une mobilisation collective – syndicats, ONG, universitaires – pour dénoncer une injustice institutionnelle qui mine les fondements même de l’enseignement supérieur public.

Au-delà des chiffres et des procédures, cette crise met en lumière une réalité préoccupante celle de la fragilité des dynamiques d’excellence dans l’enseignement supérieur face aux lenteurs et aux manquements administratifs. Par ailleurs, il est cruciale de rétablir la confiance, à honorer les engagements et à sauvegarder une formation universitaire qui, bien au-delà des murs de l’université, incarne l’avenir du journalisme marocain.

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