Le marché de l’audit et du conseil au Maroc est sous haute surveillance. Dans un communiqué officiel publié lundi, le Conseil de la concurrence a confirmé avoir mené récemment des opérations de visite et de saisie inopinées dans les locaux de deux entreprises, soupçonnées de pratiques anticoncurrentielles. Ces interventions, encadrées par la loi, marquent une escalade dans une affaire aux implications économiques et juridiques sensibles.
Selon le Conseil, ces opérations ont été autorisées par le Procureur du Roi et réalisées avec l’appui d’officiers de police judiciaire, conformément à l’article 72 de la loi n°104-12 relative à la liberté des prix et de la concurrence. Elles s’inscrivent dans le cadre d’une enquête ouverte sur de possibles accords illicites entre deux cabinets opérant dans le secteur de l’audit légal, soupçonnés de collusion non déclarée et de faussage des appels d’offres publics.
Toutefois, le Conseil tient à souligner qu’à ce stade, ces interventions ne préjugent en rien de la culpabilité ou non des entreprises visées. Il s’agit d’une mesure d’enquête destinée à recueillir des éléments de preuve, dans le respect strict des droits de la défense. « Seules les instances délibératives du Conseil peuvent, à l’issue d’une instruction contradictoire, statuer sur la réalité ou non des pratiques incriminées », précise le communiqué.
Conformément aux obligations légales, l’identité des entreprises perquisitionnées demeure confidentielle, tout comme la nature exacte des pratiques suspectées. Cette discrétion vise à garantir l’intégrité de la procédure et à préserver les droits fondamentaux des acteurs économiques concernés, conformément aux principes du contradictoire.
Ces opérations marquent une utilisation rare mais décisive de l’article 72, qui permet au Conseil d’agir de manière proactive et d’intervenir directement sur le terrain, notamment en cas de soupçons de « gun jumping » ou d’ententes anticoncurrentielles. Le recours à ce levier d’investigation souligne la volonté de l’instance de faire respecter rigoureusement la concurrence dans des secteurs sensibles et soumis à des tensions de marché croissantes.
Ce développement intervient dans un climat déjà tendu dans la profession, après la plainte déposée fin 2024 visant deux acteurs majeurs du secteur, pour coordination illégale lors d’appels d’offres publics. Le Conseil de la concurrence, fort de ses prérogatives renforcées depuis la loi 20-13, affiche ainsi sa détermination à protéger l’équité du marché et à sanctionner toute tentative de verrouillage ou de distorsion des règles du jeu.