Ahmed Lahlimi : l’inflation est devenue une donnée structurelle de l’économie marocaine, que l’on doit s’habituer à vivre avec
L’inflation a atteint 10,1% à fin février selon la dernière note de le Haut Commissariat au Plan (HCP) le mardi 21 mars, sur les prix à la consommation. Une première depuis la fameuse crise inflationniste des années 1980.
Cette forte inflation, comme le détaille le HCP, n’est pas due à la hausse des prix des matières premières sur les marchés internationaux, mais est tirée essentiellement par la hausse des produits alimentaires, qui sont produits localement, au Maroc. Ce qui rejoint l’analyse de Bank AlMaghrib, qui parle dans son communiqué post-conseil d’un choc de l’offre sur le marché.
Ahmed Lahlimi a révélé, dans une interview au journal Media 24, que le taux d’inflation, qui a atteint 10,1%, est principalement dû à la hausse des prix alimentaires, qui a connu une augmentation de plus de 20% au cours de l’année.
Selon Ahmed Lahlimi Alami,le haut commissaire au plan, le secret est de reconnaître d’abord que l’inflation est devenu un élément structurel de l’économie marocaine, et nous doivent s’habituer avec, car cela est dû au manque d’approvisionnements, en particulier les produits agricoles. Une fois ces données identifiées, il devra agir sur la source du problème, la production, en faisant cela pour qu’en menant ce qu’il appelle « la révolution de notre système de production« .
La note que le HCP rédigée était claire; selon M.Lahlimi le chiffre de 10,1 % suggère que l’inflation est largement due à la hausse des prix alimentaires, qui ont augmenté de plus de 20 % au cours de l’année. Cette hausse de prix est très élevée car il y a aussi un effet de base qui joue. Quand on parle d’une croissance de 10,1 %, c’est un chiffre stop-and-go par rapport à ce qu’il était fin février 2023 en comparaison avec les niveaux de prix de février 2022, les niveaux de prix pour ce mois sont toujours normaux car la forte inflation ne commence qu’en mars/avril 2022.
Cela signifie que le niveau des augmentations de prix sur 12 mois diminuera à partir du mois prochain. Nous n’atteindrons probablement pas le niveau de 10 %. La hausse ralentira, forcée par des effets de base. On n’est donc plus dans l’inflation importée, parce que les aliments, en particulier les fruits et légumes, produit localement au Maroc.
Par conséquent, il faut qu’on se rende compte que l’on est dans une situation où l’agriculture doit faire sa révolution pour changer de système de production, aller vers une souveraineté alimentaire et produire pour ce que nous consommons en premier lieu, avec, dans la mesure du possible, la réalisation de progrès techniques et technologiques pour améliorer les rendements.
Selon le parton de HCP les produits alimentaires ont fortement augmenté, c’est donc à cause d’une insuffisance de l’offre sur le marché; il indique qu’il y a trois facteurs qui montre que cette inflation sera durable :
« le premier facteur concernant la sécheresse, conformément à M.lahlimi « Après deux années de sécheresse, et une année à moitié sèche – celle que nous vivons actuellement –, nous sommes dans une situation où nous produisons moins qu’avant. Nous avons donc un problème d’offre.
Deuxième facteur, ce que nous importons est devenu plus cher, et aura tendance à le rester. Parce que les coûts de production dans le monde augmentent et les aléas géostratégiques sont toujours prégnants sur le marché.
Troisième facteur qui montre que cette inflation sera durable : les besoins énormes en investissements dont le monde a besoin. Avec les impératifs de transition écologique et énergétique, de décarbonation industrielle, d’intégration des technologies dans les systèmes de production et dans les services, les besoins en investissements deviennent colossaux. Ce qui a un impact direct sur les coûts de production, qui vont augmenter d’année en année, pour se répercuter sur les prix des produits finaux. »
Ahmed Lahlimi a confirmé que l’inflation diminuera lorsque nous mettrons en œuvre des réformes pour améliorer nos approvisionnements et notre productivité, tout en travaillant à l’assainissement de nos circuits de distribution. Ce sont des questions fondamentales qui doivent être traitées et l’opinion publique doit être traitée avec respect et maturité et lui dire la vérité pour qu’elle soit au courant des réformes qui doivent être mises en œuvre, mais c’est qu’on fait est exactement le contraire, en disant que tout va bien et que le problème de l’inflation sera résolu par la politique monétaire.
En réponse à une question s’il faut donner la priorité à la lutte contre l’inflation ou à l’accélération de la croissance ? Lahlimi a répondu : « C’est un cas de schizophrénie. D’une part, nous distribuons des revenus aux jeunes à tout prix à travers des programmes tels que des ateliers ou des opportunités, et nous encourageons les entreprises par des subventions tout en mobilisant les banques, et d’autre part , on augmente le coût de financement de l’économie. »
Il a souligné que « le secteur de la construction, sur lequel nous comptions pour la relance, sera complètement mis à mal. Les entreprises qui ont obtenu des crédits pendant la crise du Covid-19 ou à la veille d’une hausse des taux d’intérêt vont se retrouver dans une situation difficile, et leurs banques seront entravés. Ceux-ci réévalueront les risques à la hausse et deviendront plus restrictifs dans leur répartition. »
Ahmed Lahlimi a conclut que nous avons un problème d’offre et non de demande. Il faut aussi que l’on accepte que le développement de notre pays passe désormais par une augmentation des prix. Et que cette inflation s’inscrit dans une période de réforme et de changement de paradigme dans les politiques économiques. C’est comme cela que se sont développés plusieurs pays dans le monde, et c’est ce que nous enseigne également la littérature de l’après-industrialisation. Il faut continuer nos efforts de développement du pays et s’habituer à l’inflation.