Africa Intelligence : Après son voyage…Tebboune insulte Ramtane Lamamra en lui retirant son passeport diplomatique
Ramtane Lamamra, qualifié de « diplomate chevronné » par la presse algérienne lors de sa nomination au poste de ministre des Affaires étrangères en juillet 2021, est sorti par la petite porte le 16 mars dernier. L’ancien chef de la diplomatie algérienne est désormais privé de son passeport diplomatique. Cela signifie qu’il lui est interdit de quitter l’Algérie, même en état de semi-détention.
En tant qu’ancien ministre des Affaires étrangères, Ramtane Lamamra a le droit de voyager hors d’Algérie, d’obtenir un passeport diplomatique et de jouir de tous les privilèges que ce passeport accorde à son détenteur. Cependant, près de deux mois après son limogeage du gouvernement par le président algérien Abdelmadjid Tebboune, qu’il considère comme un candidat potentiel à la présidence, Ramtane Lamamra éprouve des difficultés à obtenir un tel passeport diplomatique.
Dans un article publié le jeudi 8 juin, Africa Intelligence, un site Internet basé à Paris et spécialisé dans l’actualité politique et économique en Afrique, a rapporté que M. Lamamra s’était vu refuser un passeport diplomatique. « L’ancien ministre des Affaires étrangères Ramtane Lamamra s’est-il vu refuser un passeport diplomatique ? « Plus d’un mois après la demande de renouvellement de son passeport diplomatique auprès du ministère des Affaires étrangères, qu’il dirigeait il y a encore quelques mois, la demande de Ramtane Lamamra s’est heurtée au silence de l’administration.
Ahmed Attaf, qui lui a succédé à la tête du ministère et qui est le seul habilité à délivrer les passeports diplomatiques, aurait-il reçu des instructions strictes du Palais de la Mouradia pour ne pas présenter le passeport à Lamamra, dont « les tentatives des services protocolaires du ministère se poursuivent, mais en vain », selon Africa Intelligence.
Légalement, et en vertu du décret présidentiel de 1997 relatif à la délivrance du passeport diplomatique, amendé par le décret signé par Abdelmadjid Tebboune il y a une semaine, Ramtane Lamamra, en sa qualité d’ancien ministre des Affaires étrangères, est en droit de recevoir le précieux document, conformément à l’article 7 du décret présidentiel n° 23-201 du juin 2023, qui fixe les conditions d’octroi des documents officiels de voyage délivrés par le ministère des Affaires étrangères.
A l’exception des conditions impossibles, car elles sont vagues, et qui, selon l’interprétation qui en est faite, peuvent constituer des obstacles à l’obtention du passeport diplomatique. L’article 7 du décret présidentiel publié début juin stipule : « Ont droit au passeport diplomatique les personnalités suivantes, leurs conjoints, leurs enfants mineurs et leurs filles célibataires vivant sous le même toit, à condition qu’ils s’engagent à respecter leurs rangs, à résider en Algérie et à ne commettre aucun acte préjudiciable aux intérêts supérieurs et à la dignité de l’Etat ».
Dans le « pays sur la tête duquel il marche », selon les termes de Jean-Louis Lovett et Paul Tulila, auteurs de l’ouvrage de référence « La maladie algérienne », l’opacité et l’arbitraire sont des caractéristiques inhérentes au régime. Sans surprise, Tebboune et ses conseillers considèrent le comportement de Lamamra comme « un acte qui porte atteinte aux intérêts supérieurs et à la dignité de l’Etat », ce qui non seulement le rend inéligible au passeport diplomatique, mais lui ouvre également la voie de la prison.
A-t-on reproché à Lamamra, en vertu de cet article 7, de ne pas avoir « respecté son rang » en se considérant comme un possible futur remplaçant de Tebboune au palais d’El Mouradia ? Sinon, pourquoi lui refuse-t-on un passeport diplomatique et le bannit-on comme un paria, alors que la quasi-totalité des ministres limogés du gouvernement l’ont été en même temps que ceux qui ont été nommés à d’autres postes de haut niveau, à la présidence ou dans d’autres institutions ?
Il est aussi certain que Tebboune ne veut en aucun cas voir Lamamra quitter l’Algérie et retrouver un poste « international » aux Nations unies, à l’Union africaine, en Europe, ou dans un think tank comme l’Institut international de recherche sur la paix de Stockholm, qu’il a rejoint en 2020, lorsque l’administration américaine s’est fortement opposée à l’intention du président de l’ONU, Antonio Guterres, de nommer Lamamra comme son envoyé spécial en Libye.
D’ici les élections présidentielles de décembre 2024, Ramtane Lamamra pourrait être rassuré de devoir le placer en résidence surveillée à Alger, ou « interdit de sortie du territoire national », car s’il occupe la fonction la plus basse sur le plan international, il pourrait couvrir Tebboune. Si Tebboune tient à rester à la présidence après 2024, ce n’est pas seulement pour le prestige du poste, mais par crainte de rejoindre, en compagnie de son fils Khaled (trafiquant de cocaïne) et de Mohamed (le prédateur qui a endossé le rôle de Saïd Bouteflika), les anciens Premiers ministres Abdelmalek Sellal, Ahmed Ouyahia et Noureddine Bedoui à la prison d’El Harrach.