Face à la situation difficile que traverse le pays que ce soit sur le plan économique ou social, les contradictions au niveau des données de cette crise ne font que s’accentuer que ce soit par le gouvernement, le Wali de la Banque du Maroc (BM) ou encore le Haut-commissaire au Haut-commissariat au plan.
Cette situation paradoxale a eu comme conséquence une série de manifestations dans différentes villes du royaume pour revendiquer cette hausse des prix inacceptable et son impact sur le pouvoir d’achat des couches défavorisées ainsi que la tendance de cette politique d’appauvrissement et finalement cette insécurité alimentaire, devenue une réalité indéniable face à une incohérence et une incapacité gouvernementale de trouver des solutions concrètes.
Ainsi et selon des statistiques officielles fournies par le Haut-commissariat au plan, le Maroc est un pays qui produit 100 % de ses besoins en légumes et fruits et est classé parmi les premiers exportateurs des produits halieutiques en particulier la sardine sans toutefois oublier l’existence de plus de 500 autres espèces et c’est ce qui fait de lui le 1er exportateur au niveau de l’Afrique et le 13e au niveau mondial.
Cependant, le chef du gouvernement justifie cette crise et cette inflation galopante par la faible pluviométrie de la dernière saison, la hausse des produits énergétiques, la vague du froid ainsi que les conséquences du post-Covid et la guerre en Ukraine.
Or, une sortie d’Ahmed Lahlimi a tout basculé puisqu’elle était très franche et très rigoureuse dans laquelle il a mis en exergue les vraies raisons de cette crise, dont principalement la satisfaction de la demande des pays étrangers en particulier européens, demandeurs de plus en plus des produits marocains en légumes, fruits et poissons. Ce qui a encouragé les professionnels du secteur agricole à se lancer dans l’exportation vers l’Europe et l’Afrique sans se soucier du marché national et entraîner une hausse des prix et une spéculation qui échappe à tout contrôle de l’État tant à l’échelle centrale que locale.
Une situation que le gouvernement actuel n’a pas pu gérer et qui s’est déclaré incapable de résoudre dans l’immédiat étant donné les lobbys en jeu ainsi que la montée en puissance des intermédiaires, des spéculateurs et des sous-traitants qui ne cessent de profiter de cet échec au détriment du consommateur et du citoyen marocain en détresse.
À noter également qu’avant la déclaration d’Ahmed Lahlimi, il y a eu un désaccord entre le chef du gouvernement Aziz Akhannouch et le Wali de la Banque du Maroc au sujet de cette inflation et qui a nécessité l’intervention du palais selon des sources médiatiques, suite à une demande du chef du gouvernement après la décision du Wali de la Banque du Maroc d’augmenter le taux d’intérêt à 3 % et c’est ce qui allait avoir un impact très négatif sur le gouvernement d’Aziz Akhannouch. Toujours en relation avec le même sujet, la raison de ce désaccord réside dans le fait que le Wali de la BM dément catégoriquement que cette inflation soit importée comme le soutient le chef du gouvernement.
Et c’est dans le même sens que virent les déclarations d’Ahmed Lahlimi qui souligne que l’inflation est devenue structurelle et que le gouvernement doit avoir le courage d’être franc avec les marocains. À cet effet, le Haut-commissaire a estimé que « l’inflation est devenue une donnée structurelle dans notre économie et il faut s’habituer à vivre avec, elle est causée, selon lui, par une insuffisance de l’offre sur le marché local, et non par une augmentation de la demande qui pousserait les prix à la hausse. »
S’agissant du Plan Maroc Vert, il est à noter que ce dernier a pris une directive tout à fait contraire à celle qui lui a été dessinée au départ, en favorisant des cultures destinées à l’exportation au détriment des cultures vivrières, épuisant les ressources en eau et détruisant le petit agriculteur. Lorsque la priorité devait être accordée au marché local et à la mise au point d’un système de production nationale qui garantit tous les produits dont le Marocain a besoin. Une révision du secteur agricole s’impose dans l’immédiat avec toutefois une introduction des nouvelles technologies pour une optimisation du rendement et une stabilité alimentaire dans le pays.
Enfin et après le rapport du Wali de la BM, les déclarations du Haut-commissaire au HCP et la dernière intervention du président de la chambre des conseillers sur la manière de la gestion de cette crise au Maroc… Est-ce une reconnaissance de l’échec par les institutions gouvernementales dans leur politique de la garantie de la sécurité alimentaire pour les Marocains ? Est-ce que cette reconnaissance va donner lieu à un remaniement gouvernemental qui va toucher plusieurs ministres du RNI, du PAM et finalement de l’Istiqlal ?