Face à une crise alimentaire mondiale et à une inflation galopante des intrants agricoles causées à la suite de la guerre en Ukraine, la recherche de l’autosuffisance alimentaire en Afrique s’impose.
C’est la raison pour laquelle le sommet Dakar2 s’est tenu à Daimniadio du 25 au 27 janvier de l’année en cours sous le thème : « nourrir l’Afrique : souveraineté alimentaire et résilience. »
Un sommet qui a donc mis le doigt sur cette plaie qui ne cesse de s’ouvrir s’elle n’est pas soignée compte tenu de la situation alimentaire en Afrique marquée surtout par une malnutrition dont souffrent 283 millions d’africains aujourd’hui et qui risquent de croître d’ici 2050 si des mesures sérieuses ne sont pas prises.
Ainsi, à l’ouverture de ce sommet, le président de la Banque africaine de développement, coorganisateur avec le Sénégal, Akinwuumi Adesina a lancé : « le temps de l’action est venu. L’heure pour la souveraineté et la résilience pour l’Afrique ». Cette déclaration prouve bien l’état d’urgence d’une prise de décisions qui peuvent garantir à l’Afrique d’ici 2050 une sécurité alimentaire et la libérer de cette dépendance de l’étranger, surtout que cette dernière dispose de 65% des terres arables du monde et constitue par la même occasion son grenier.
Il est donc clair que le problème de l’autosuffisance alimentaire n’est plus pris à la légère mais considéré comme une priorité pour cette Afrique qui rêve de sa souveraineté et d’une entière autonomie. A cet effet, la Banque africaine du développement a décidé de consacrer dix milliards de dollars au cours des cinq prochaines années pour le développement agricole et la souveraineté alimentaire du continent africain.
Un financement qui s’articulera autour d’un appui direct dans la livraison d’intrants agricoles et alimentaires. « L’agriculture doit devenir le nouveau pétrole de l’Afrique » et, pour ce faire, il faut « des moyens adéquats et durables » pour attirer les jeunes vers les champs et un soutien conséquent aux agriculteurs, surtout les petits exploitants agricoles dont la majorité sont des femmes, a insisté le président de la BAD devant un parterre de chefs d’État mais aussi de représentants du secteur privé, des exploitants agricoles, des partenaires au développement et des dirigeants d’entreprise.
Le scénario du pire, avec des « ouragans de famine », comme le craignait l’ONU, a été évité grâce à la reprise des exportations ukrainiennes cet été, mais les prix resteront soutenus en 2023, avec toujours une forte volatilité, a averti l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO).
An noter également que le secteur agricole occupe une place centrale dans l’économie des pays africains, représentant 23% du PIB et employant 55% de la population active. D’où l’intérêt de s’activer pour atteindre les objectifs de l’Agenda 2063 de l’Union Africaine dont la stratégie de Malabo, la Zone de libre-échange continental africaine (Zlecaf) et finalement le programme détaillé pour le développement de la ‘agriculture africaine (PDDAA).
Toujours en relation avec ce sommet, l’expérience du Maroc dans le domaine agricole a été un modèle à suivre surtout que le Maroc, durant la COP22 à Marrakech, avait lancé l’initiative pour l’adaptation de l’agriculture africaine, réunissant 38 pays du continent. Une initiative qui a pour objectif la réduction de la vulnérabilité de l’Afrique et de son agriculture aux changements climatiques. A cette occasion, le chef du gouvernement, Aziz Akhenouch, en rebondissant sur initiative, a déclaré : « Cette coopération vise à transférer vers les pays africains les expériences de développement agricole réussies au Maroc afin de contribuer à atteindre la sécurité alimentaire. »
Certes, les progrès atteints par le Maroc au niveau de l’agriculture avec le Plan Maroc Vert dans ses deux piliers ainsi the Green Generation, sont indéniables et doivent servir de modèle pour un développement durable de l’agriculture au niveau du continent. Une manière aussi de créer un transfert du savoir-faire entre les États d’Afrique au lieu de compter sur l’aide de l’Occident qui ne fait que plonger les pays dans la dépendance et la pauvreté, lorsque ces derniers connaissent une fuite des cerveaux qui peuvent proposer des solutions plus intelligentes et mieux adaptées aux conditions climatiques, à la nature des sols et finalement à la mentalité africaine.
Cette coopération entre les pays d’Afrique peut aussi donner lieu à des investissements et des partenariats B2B qui profiteraient à l’Afrique et enrichiraient cette Zone de libre-échange continental africaine d’une part et garantiraient une croissance à tous les niveaux d’une autre part.
Mohamed Laghouizi