France : une « journée noire » de grèves et manifestations contre l’austérité

Ecoles et transports perturbés, cortèges massifs attendus et projets d’actions coup de poing: les syndicats ont promis une « journée noire » de grèves et manifestations jeudi en France pour peser sur les prochains choix budgétaires du Premier ministre, nommé la semaine dernière en pleine crise politique.

C’est la deuxième journée de mobilisation en huit jours, après celle du mouvement « Bloquons tout » le 10 septembre, lancé sur les réseaux sociaux. Mais celle de jeudi, à l’appel des huit syndicats unis pour la première fois depuis juin 2023, s’annonce bien plus massive.

Les autorités estiment que les plus de 250 manifestations annoncées pourraient réunir jusqu’à 900.000 personnes à travers le pays. A Paris, le préfet de police s’est dit « très inquiet » de la présence de nombreux casseurs dans la manifestation prévue dans la capitale, où il attend 50.000 à 100.000 personnes.

Comme le 10 septembre, environ 80.000 policiers et gendarmes ont été déployés à travers le pays, appuyés par des drones, 24 engins blindés Centaure et dix canons à eau.

Les forces de l’ordre ont commencé à disperser, parfois à coup de gaz lacrymogènes, des rassemblements et tentatives de blocages, comme à Marseille (sud) où des appels avaient été lancés sur les réseaux sociaux pour bloquer le siège de l’armateur CMA-CGM, propriété du milliardaire Rodolphe Saadé.

Jeudi matin, les transports en commun étaient perturbés, notamment à Paris où la plupart des métros et trains de banlieue ne circuleront qu’aux heures de pointe. Les trafics nationaux ferroviaire et aérien étaient peu affectés.

Le ministre démissionnaire de l’Intérieur, Bruno Retailleau, a évoqué une tentative, déjouée, de « sabotage » sur un réseau d’eau en Martinique et des « points de blocage débloqués » en région parisienne.

« Ruptures » promises

Cette mobilisation vise les mesures budgétaires « brutales » (coupes dans le service public, réforme de l’assurance chômage, gel des prestations sociales…) prévues dans un plan d’économies de 44 milliards d’euros annoncé cet été par le Premier ministre, François Bayrou, pour tenter de réduire le déficit abyssal de la France (114% du PIB).

Son gouvernement, alliant le centre droit et la droite, minoritaire à l’Assemblée nationale, a été renversé par les députés le 8 septembre.

Nommé le lendemain, son successeur, Sébastien Lecornu — troisième Premier ministre d’Emmanuel Macron depuis qu’il a dissous l’Assemblée nationale en juin 2024, le cinquième depuis sa réélection en 2022 — s’est lui aussi engagé à réduire le déficit qui plombe les comptes de la nation (114% du PIB), tout en promettant des « ruptures sur le fond ».

Ce fidèle du président a entamé une série de consultations avec les partis politiques avant de composer un gouvernement et présenter son programme, en vue de boucler dès que possible un projet de budget pour 2026.

Il a également reçu quasiment tous les syndicats, qui n’en ont pas moins maintenu leur mot d’ordre, espérant une mobilisation similaire à celles de 2023 contre la réforme des retraites qui avaient régulièrement réuni un million de manifestants, dont un pic à 1,4 million.

« Démonstration de force »

L’abandon par Sébastien Lecornu de la très controversée suppression de deux jours fériés voulue par François Bayrou n’a pas apaisé la colère.

« Aucune des mesures catastrophiques du musée des horreurs de M. Bayrou n’est enterrée ! », s’est indignée lundi la secrétaire générale du syndicat CGT, Sophie Binet, après avoir rencontré le nouveau Premier ministre. « Le budget va se décider dans la rue », estime-t-elle, appelant à une « démonstration de force ».

Même la CFDT, syndicat réputé plus apte au compromis, est « plus que jamais motivée pour aller dans la rue », a fait savoir sa secrétaire générale, Marylise Léon, qui attend « des faits et des preuves » du nouveau chef de gouvernement, et notamment un « besoin d’efforts partagés » avec les plus riches.

La réforme des retraites de 2023, passée par une procédure spéciale sans vote au Parlement, est toujours dans le viseur des syndicats. Sophie Binet a demandé son « abrogation », Marylise Léon sa « suspension ».

AFP

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