Le gouvernement espagnol a adressé un avertissement formel au conseil municipal de Jumilla, dans la région de Murcie, l’enjoignant de revenir sur sa récente décision interdisant l’usage des installations publiques pour les célébrations à caractère islamique.
Madrid a fixé au conseil municipal un délai d’un mois pour abroger cette mesure, adoptée par des élus du Parti populaire sur proposition de la formation d’extrême droite Vox, faute de quoi elle engagera une procédure contentieuse-administrative. L’exécutif central n’a pas hésité à qualifier cette décision de « raciste » et « extrémiste ».
Cette interdiction, visant une ville qui accueille une importante communauté marocaine, a suscité un vif émoi et un large débat, y compris dans les villes occupées de Ceuta et Melilla.
Pour le gouvernement, cette mesure « restreint de manière arbitraire et porte atteinte au droit fondamental à la liberté religieuse » garanti par la Constitution aux citoyens de confession musulmane. Les textes en vigueur, souligne-t-il, « autorisent l’utilisation des infrastructures sportives à des fins sociales et culturelles », rendant ainsi les justifications avancées « dénuées de tout fondement objectif ».
L’exécutif national estime que « l’intention véritablement discriminatoire » de cette décision ressort avec évidence, tant à la lecture de son texte initial qu’au travers des déclarations du porte-parole de Vox, qui s’est publiquement félicité d’avoir empêché les célébrations islamiques.
« Il est manifeste que nous sommes face à une nouvelle violation des droits et libertés fondamentaux commise par des exécutifs locaux et régionaux liés à la droite et à l’extrême droite, ce qui appelle l’intervention du gouvernement espagnol pour défendre la Constitution », souligne un communiqué officiel.
Et d’ajouter : « Nous réaffirmons notre engagement à protéger la Constitution, les valeurs démocratiques et la coexistence pacifique. Nous combattrons, politiquement comme juridiquement, toute initiative visant à saper les droits et libertés et à entraîner l’Espagne dans une dérive autoritaire, à l’instar de ce qui s’est produit dans d’autres pays où l’extrême droite est parvenue au pouvoir. »
Dans la requête officielle, l’exécutif central insiste sur le fait que la décision de Jumilla procède « d’une intention idéologique d’exclusion religieuse reconnue ouvertement par ses auteurs », sans qu’aucune alternative raisonnable ni justification fonctionnelle n’ait été avancée. À défaut d’abrogation dans le délai imparti, une action contentieuse-administrative sera engagée.
La ministre de l’Intégration, de la Sécurité sociale et des Migrations, Elma Saiz, avait déjà averti, la semaine précédente, que le gouvernement « veillera scrupuleusement au respect de la Constitution ». La position du ministère de la Présidence, de la Justice et des Relations avec le Parlement va dans le même sens.
Ces deux départements ont agi de concert avec le ministère de la Politique territoriale pour saisir officiellement la municipalité. Selon l’agence de presse espagnole EFE, la démarche a été initiée par la déléguée du gouvernement dans la région de Murcie, Mariola Guevara, qui a affirmé, lundi 11 août 2025, que l’exécutif ne pouvait rester inactif : « Nous ne pouvons tolérer la violation de nos droits », a-t-elle déclaré, rappelant que « cette décision bafoue clairement le droit à la liberté religieuse ».
Le ministre de la Politique territoriale, Ángel Víctor Torres, a pour sa part martelé sur X : « Face à l’intolérance, il n’y a pas de compromis possible. Ni le Parti populaire ni Vox ne peuvent décider à qui s’applique ou non la liberté de culte. C’est un droit constitutionnel. »
Son collègue de la Présidence et de la Justice, Félix Bolaños, a également dénoncé sur la même plateforme « la dérive extrémiste de l’alliance entre le Parti populaire et Vox », promettant de « mettre un terme à leurs initiatives radicales » au nom de la défense « de la Constitution, des droits et de la liberté religieuse ».
La porte-parole du Parti socialiste, Montse Mínguez, a quant à elle accusé le Parti populaire de « reprendre à son compte l’idéologie de Vox », assénant : « Vox commande, le Parti populaire exécute, et tout le monde y perd. »
En réaction, le Parti populaire a assuré que la mesure controversée « n’a aucun effet juridique », par la voix de son secrétaire adjoint aux Finances, Juan Bravo, qui a accusé le gouvernement de chercher uniquement à « provoquer un vacarme médiatique ».