El País : l’Espagne accorde un milliard d’euros de crédits au Maroc pour moderniser ses infrastructures en vue du Mondial 2030
Selon des informations publiées par le quotidien espagnol El País, Madrid a alloué un milliard d’euros sous forme de prêts à taux préférentiels destinés à financer des projets stratégiques au Maroc, dans le cadre des préparatifs de la Coupe du Monde de football 2030. Cette opération financière s’inscrit dans une démarche globale de soutien aux entreprises espagnoles désireuses d’investir sur le marché marocain, alors que le Royaume prévoit de consacrer annuellement l’équivalent de 1 % de son produit intérieur brut à des projets de modernisation avant le début du Mondial.
Un cadre de coopération économique renforcé
La démarche de Madrid ne se limite pas à une simple opération de crédit. Elle symbolise la volonté d’une Espagne ambitieuse de consolider sa position d’investisseur de premier plan dans l’un des marchés les plus dynamiques du bassin méditerranéen. Dans ce contexte, le financement de projets d’envergure – tels que l’extension des infrastructures de transport, le développement des réseaux d’eau et d’assainissement, ou encore la modernisation des équipements sportifs – se présente comme un levier essentiel pour assurer la réussite des manifestations internationales à venir.
L’opération se décline en plusieurs volets financiers dont un premier prêt de plus de 250 millions d’euros accordé à l’entreprise espagnole Acciona pour la construction d’une nouvelle station de dessalement à Casablanca. Ce prêt, remboursable selon des conditions avantageuses, a été suivi par un second apport financier de plus de 750 millions d’euros, renforçant ainsi la capacité d’investissement de Madrid sur le territoire marocain. Lors du Forum des affaires maroco-espagnol tenu à Rabat, Maria Amparo López-Senovilla, secrétaire d’État espagnole chargée du Commerce, a souligné que « l’expertise et la compétitivité des entreprises espagnoles joueront un rôle déterminant dans la réussite des projets d’infrastructure majeurs entrepris par le Maroc ».
Au-delà des prêts consentis, le partenariat se révèle comme une opportunité pour le Maroc d’intégrer une expertise européenne reconnue. D’après des données de l’ICEX, l’Agence espagnole de soutien à l’exportation, le Royaume envisage d’investir environ 14 milliards d’euros par an – soit l’équivalent de 1 % de son PIB – afin de relever les défis logistiques et organisationnels liés à l’accueil de plus de 21 millions de visiteurs et à la tenue de matches dans six villes hôtes. Cette stratégie ambitieuse s’appuie sur un double objectif : moderniser les infrastructures nationales et assurer une intégration optimale dans la dynamique des grands événements internationaux.
Le secteur ferroviaire constitue l’un des axes prioritaires de ce plan de modernisation. Le Plan National des Chemins de Fer (ONCF) prévoit l’acquisition de 40 trains à grande vitesse interurbains, de 60 trains régionaux et de 50 trains de banlieue, afin de renforcer le maillage existant et de desservir de nouveaux corridors. Dans le cadre des appels d’offres, la concurrence est féroce. Si la société espagnole Talgo a été écartée dès la première phase, l’entreprise française Alstom s’est déjà distinguée en remportant, en octobre dernier, un contrat pour la fourniture de 18 trains à grande vitesse sur la ligne reliant Kénitra à Marrakech.
Par ailleurs, deux autres acteurs – la société espagnole CAF et le constructeur sud-coréen Hyundai Rotem – continuent de se disputer le contrat, lequel inclut également la maintenance des trains sur une durée de 20 ans, tout en intégrant une part de production locale dans l’économie marocaine. Le directeur général de Hyundai Rotem avait d’ailleurs évoqué, en juillet, un projet de construction d’une usine de fabrication de trains au Maroc en cas de victoire de son entreprise, signe de la montée en puissance de la compétition entre partenaires européens et asiatiques.
L’investissement espagnol ne se limite pas au financement des infrastructures. En effet, Madrid consolide sa position en tant que premier partenaire commercial du Maroc, avec un volume d’échanges atteignant 22 milliards d’euros en 2024 et un excédent commercial de 3 milliards d’euros en sa faveur. Maria Amparo López-Senovilla a ainsi précisé que les exportations espagnoles vers le Maroc surpassent celles adressées à la Chine et au Mexique réunis. Grâce à des conditions de crédit favorables, l’Espagne ambitionne de devenir l’investisseur numéro un dans la modernisation des infrastructures marocaines – un statut actuellement occupé par la France.
Lors du Forum des affaires maroco-espagnol, les discussions se sont articulées autour de trois grands axes : la modernisation des infrastructures (développement des aéroports, des autoroutes et des réseaux de distribution d’eau), l’essor technologique dans les secteurs de l’agriculture, de l’industrie et des services, ainsi que le renforcement de la capacité hôtelière du Maroc afin de répondre aux normes internationales d’accueil touristique.
Dans un climat de coopération diplomatique et économique en pleine expansion, il apparaît que l’Espagne joue un rôle moteur dans les projets de modernisation qui prépareront le Maroc à accueillir la Coupe du Monde 2030. En s’appuyant sur des décennies d’expertise – notamment l’expérience acquise lors de l’organisation de la Coupe du Monde 1982 et des Jeux Olympiques de Barcelone en 1992 – le Royaume chérifien entend tirer profit d’un transfert de savoir-faire susceptible de transformer profondément ses infrastructures. Ce partenariat stratégique entre Madrid et Rabat ne se résume pas à une opération financière ponctuelle, mais constitue une véritable feuille de route pour un développement intégré, qui promet de redessiner le paysage économique et urbain du Maroc dans les années à venir.