Site indépendant d'actualités

Réélection de Tebboune : un président mal élu face à une société en désarroi

0

La réélection du président algérien Abdelmadjid Tebboune, marquée par une faible participation électorale malgré les chiffres réajustés par l’Autorité électorale nationale indépendante (Anie), a renforcé l’image d’un dirigeant perçu par une grande partie de la population comme « mal élu ». Ce boycott populaire massif et le désengagement des citoyens illustrent une crise de légitimité profonde.

Ce faible taux de participation n’est pas simplement un reflet du désintérêt politique, il révèle un malaise plus profond qui touche la société algérienne, gangrénée par des désillusions sociales, économiques et politiques. Alors que le pays est confronté à des défis majeurs, la reconduction de Tebboune semble plonger davantage l’Algérie dans une spirale de crises.

L’économie algérienne traverse l’une des périodes les plus difficiles de son histoire récente. Bien que riche en hydrocarbures, le pays peine à diversifier ses sources de revenus et reste vulnérable aux fluctuations des prix du pétrole et du gaz. Cette dépendance expose l’État à des crises récurrentes, épuisant ses réserves financières et compromettant la stabilité sociale. La population en ressent directement les effets : les pénuries de produits de première nécessité, désormais courantes, rappellent tristement les périodes de crise dans d’autres pays en difficulté. Ces scènes quotidiennes témoignent d’une gestion économique défaillante, paradoxale pour un pays aussi riche en ressources naturelles.

Ce malaise ne se limite pas à l’économie. La société algérienne, notamment sa jeunesse majoritaire, est en proie à une désillusion croissante. Privée de perspectives économiques et étouffée par la répression politique, une grande partie de cette jeunesse cherche à fuir le pays, souvent dans des conditions dramatiques. Le phénomène de la migration clandestine, ou « hrig », prend des proportions alarmantes et reflète l’ampleur de la crise sociale. Les manifestations populaires, initialement portées par l’espoir du Hirak, ont perdu de leur intensité sous la pression de la répression. Les opposants politiques et les journalistes indépendants sont régulièrement emprisonnés, réduits au silence par un régime qui étouffe toute contestation.

Parallèlement, la crise de l’eau illustre encore une fois la mauvaise gestion des ressources du pays. De nombreuses régions sont frappées par des pénuries d’eau chroniques, accentuées par des infrastructures défaillantes et une planification inadéquate. Dans un contexte où le changement climatique exacerbe les défis environnementaux, l’incapacité à répondre aux besoins fondamentaux de la population montre l’incapacité de l’État à anticiper l’avenir.

Malgré ces multiples crises internes, la politique étrangère algérienne continue de se focaliser sur la rivalité avec le Maroc. Cette obsession, notamment autour de la question du Sahara, détourne l’attention des défis pressants du pays et consomme des ressources considérables, au détriment de la résolution des problèmes domestiques. Pourtant, cette stratégie semble de moins en moins convaincante aux yeux des Algériens. Confrontés à des crises sociales, économiques et politiques, ces derniers sont de plus en plus insensibles à cette tentative de diversion qui consiste à désigner le Maroc comme un ennemi.

Le régime de Tebboune, bien qu’il tente de maintenir une façade de stabilité, ne parvient plus à dissimuler la réalité vécue par la population. Les médias contrôlés par l’État véhiculent encore un discours officiel en décalage avec le quotidien des Algériens, mais l’ère numérique a changé la donne. Grâce aux réseaux sociaux et aux médias alternatifs, la population a accès à des informations plus proches de sa réalité, rendant encore plus flagrante la fracture entre les déclarations du pouvoir et la vie réelle.

La réélection de Tebboune, dans ce contexte, soulève des questions cruciales sur l’avenir de l’Algérie. Le pays semble pris au piège d’une gouvernance dépassée, incapable de s’adapter aux défis du XXIe siècle. Alors que la précarité augmente, l’élite au pouvoir persiste à faire diversion, refusant de reconnaître l’ampleur des problèmes. Tebboune, qui s’était engagé en 2019 à réaliser 54 promesses électorales, affirme en avoir concrétisé 75 %. Cependant, hormis quelques projets symboliques comme la station de dessalement de l’eau de mer, aucune réalisation majeure n’a vu le jour. Cette situation pousse certains Algériens à conclure que le président n’a pas reconstruit, mais plutôt « détruit 75 % de l’Algérie » et pourrait « achever les 25 % restants avant la fin de son mandat ».

Laisser un commentaire

Votre adresse email ne sera pas publiée.