Hausse des prix : Le rapport du Conseil de la Concurrence met en lumière la “cupidité inflationniste”
Le Conseil de la Concurrence a affirmé dans son rapport annuel pour l’année 2023 que, « les causes de l’inflation de 2022 aient été principalement liées aux chocs d’offre externes, à travers les prix des importations qui ont entraîné une augmentation des coûts de production et de vente aux consommateurs finaux, l’inflation de 2023 s’est, au contraire, inscrite dans un contexte marqué par un recul des pressions inflationnistes externes, bien que de manière plus modérée ».
Cela a conduit, poursuit le même rapport, à l’effet de plusieurs déterminants sur son évolution, notamment dans l’atténuation des pressions inflationnistes persistantes qui ont perduré jusqu’aux premiers mois de l’année 2023.
En conséquence de cette situation, indique le Conseil de la Concurrence dans son rapport, les causes de l’inflation importée ont considérablement diminué « étant donné que l’inflation a été peu affectée par les composantes volatiles, notamment les denrées alimentaires et les carburants. Toutefois, les répercussions des chocs climatiques sur l’offre intérieure des produits alimentaires ont constitué un facteur décisif dans les fluctuations conjoncturelles des prix de certains produits, en particulier les fruits et légumes ».
Le rapport a souligné dans ce contexte que, « en plus des chocs macro-économiques de l’offre, il ne faut pas négliger d’autres types de chocs micro-économiques. Ces derniers proviennent de la capacité des entreprises dotées d’un pouvoir de marché à augmenter les prix pour profiter des gains de l’inflation, notamment par l’accroissement déraisonnable des marges bénéficiaires ».
Ce phénomène est connu dans la littérature économique, selon le même rapport, sous le terme de « cupideflation » (inflation par cupidité). Ce concept s’ajoute à d’autres pratiques à la limite de la légalité, qui ont été identifiées dans divers marchés, comme « la shrinkflation » (réduction des quantités pour maintenir le prix) et le « cheapflation » (détérioration de la qualité des produits).
La cupideflation se réfère à l’exploitation par certains grands groupes d’une conjoncture inflationniste pour augmenter les prix et accroître les marges bénéficiaires, soit en augmentant les prix des biens et services au-delà de la hausse constatée des coûts des matières premières, soit en augmentant les prix de certains produits et services dont les coûts de production n’ont pas augmenté.
Ce phénomène s’est manifesté au cours des deux dernières années, notamment à travers l’exploitation, par certains professionnels de secteurs particuliers, d’augmentations parfois minimes des prix des carburants, par exemple 10 centimes, pour justifier des hausses des prix des biens de consommation dépassant parfois 2 dirhams…
Le Conseil de la Concurrence a noté que « la légère reprise de la consommation finale des ménages en 2023 représentait un risque important pour le contrôle de l’inflation. Toutefois, ses niveaux sont restés inférieurs au seuil pouvant indiquer un excès de demande », soulignant que la modération de cette consommation a alimenté les pressions désinflationnistes observées à partir de février 2023, tandis que ces pressions ont été exacerbées par « l’augmentation du taux de chômage et la détérioration continue du pouvoir d’achat », ce qui démontre « l’absence d’une spirale inflationniste prix-salaires ».
Concernant la relation entre l’inflation et les conditions monétaires, le Conseil de la Concurrence a observé que la tendance désinflationniste s’est développée « malgré l’accélération de la circulation de la monnaie de crédit », rappelant à cet égard les données fournies par Bank Al-Maghrib sur « l’augmentation des besoins de liquidités des banques en 2023, qui ont atteint 111,4 milliards de dirhams en moyenne hebdomadaire, contre 86,7 milliards de dirhams à la fin de 2022 », ce qui a incité la banque centrale à « accroître le rythme de l’injection de liquidités ».
Le Conseil de la Concurrence n’a pas exclu, dans ce contexte, que les raisons du ralentissement de l’inflation soient liées au « ralentissement de la croissance des prêts accordés aux ménages, dû au durcissement de la politique monétaire, avec une croissance passant de 3,6 % en 2022 à 2 % en 2023, selon Bank Al-Maghrib ».
En conclusion de son analyse des sources de l’inflation pour l’année écoulée, le Conseil de la Concurrence a rappelé que l’intensité de la concurrence joue un rôle crucial dans la stabilisation de l’inflation à long terme, car elle maintient l’inflation à un niveau optimal pour le bon fonctionnement des marchés, ajoutant que « l’inflation peut potentiellement nuire à la concurrence, notamment par le biais des aides de l’État, qui doivent répondre à certains critères, tels que la neutralité concurrentielle et le caractère temporaire, mais également par la coordination entre les entreprises et la conclusion d’accords pour protéger les profits.»